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Les boissons alcooliques artisanales

Hélène Bergeron, Service de la recherche
Avec la collaboration du Service de la référence
Octobre 2017

L’industrie des boissons alcooliques artisanales est en expansion au Québec depuis trois décennies. Au cours des dernières années, sa croissance s’est accélérée et tout laisse croire qu’elle poursuivra sur sa lancée. L’engouement des Québécois pour les boissons alcooliques fabriquées par les producteurs locaux et mettant en valeur le terroir québécois ne cesse de progresser.

La vitiviniculture
Les microbrasseries
Les cidreries
Les microdistilleries
Quelques faits saillants des derniers mois

LA VITIVINICULTURE

La vitiviniculture, c’est-à-dire les activités de la culture de la vigne et de la fabrication du vin, connaît un essor depuis le début des années 1980. L’industrie demeure cependant modeste par rapport à celles de l’Ontario et de la Colombie-Britannique. Les vignobles sont principalement concentrés en Montérégie, mais il s’en trouve dans d’autres régions, telles que les Laurentides, l’Estrie et la Capitale-Nationale.

Le Québec élabore une grande diversité de produits tant les traditionnels vins blancs, rouges et rosés que des vins de glace rouges et blancs ainsi que des vins fortifiés. Les cépages cultivés ici diffèrent des plus courants (les vitis vinifera) en raison du climat québécois, plus hostile aux vignes.

L’Institut de la statistique du Québec chiffrait le nombre d’emplois liés à cette industrie à 206 en 2010 et à 254 en 2015 [1]. La Régie des alcools, des courses et des jeux (RACJ), qui est responsable de délivrer les permis d’alcool, a accordé, en date de juillet 2017, 133 permis de production artisanale de vin et 15 de fabricants de vin [2]. Le nombre de ces permis était respectivement de 125 et de 13 en novembre 2015.

Le permis artisanal exige qu’au moins la moitié des raisins utilisés dans la production soit cultivée par le titulaire du permis. L’autre moitié peut être achetée à différents producteurs du Québec et il est permis d’en importer 15 %. Il est autorisé de vendre les vins artisanaux sur le lieu de production, à la Société des alcools du Québec (SAQ), lors d'événements reconnus par la RACJ et, depuis l’entrée en vigueur de la Loi sur le développement de l’industrie des boissons alcooliques artisanales en décembre 2016, dans les épiceries et les dépanneurs. Les quelque 125 vignobles québécois sont représentés par l’Association des vignerons du Québec et par les Vignerons indépendants du Québec.

Le permis de fabricant autorise l’importation et l’assemblage des vins ainsi que la commercialisation sous un nom de marque. Le produit ne peut être vendu sur le lieu d’assemblage. Il est offert en épicerie, dans les dépanneurs et à la SAQ. Les plus importantes entreprises spécialisées dans le conditionnement des vins au Québec sont regroupées au sein de l’Association des négociants embouteilleurs de vins (auparavant, l’Association des viniculteurs négociants du Québec).

Selon une étude de l’Association des économistes québécois, en 2011, les retombées économiques des vignobles totalisaient 186,3 millions de dollars. Ces données correspondaient à des ventes de 1,2 million de bouteilles.

Par ailleurs, selon le président de l’Association des vignerons du Québec, l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, qui a fait passer les points de vente de 400 à plus de 8000, incitera les petits producteurs à planter de nouvelles vignes. Alors que le Québec produit environ 2 millions de bouteilles par année, pour répondre à la demande anticipée, l’Association s’est fixé comme objectif d’en produire 10 millions d’ici 2030 [3].

LES MICROBRASSERIES

Une microbrasserie est un établissement de brassage de la bière, dont la production, plutôt faible, est réalisée de façon artisanale. L’Association des microbrasseries du Québec ajoute que, pour être considérée comme telle, la production ne doit pas excéder 300 000 hectolitres par année. La plupart des microbrasseries québécoises ne dépassent pas les 5000 hectolitres [4].

La RACJ délivre deux types de permis de microbrasserie : fabricant industriel et artisan brasseur.

Les détenteurs de permis de fabricant industriel peuvent distribuer leurs bières dans les épiceries ou dans les dépanneurs. Ils ont aussi la possibilité d’aménager un salon de dégustation à même leur brasserie, ce qui permet au client d’emporter la bière. Ce salon doit cependant être physiquement séparé du lieu de production.

Les détenteurs de permis de producteur artisanal peuvent vendre leur produit sur le lieu de production pour consommation dans un autre endroit. Rappelons que, avant l’adoption de la nouvelle loi, la bière vendue devait être consommée sur place seulement.

En 2011, 84 permis (artisan brasseur et fabricant industriel) avaient été délivrés alors que, en date de juillet 2017, 182 l’avaient été (58 artisans brasseurs et 124 fabricants industriels). L’Institut de la statistique du Québec indique que les microbrasseries offraient 1024 emplois en 2012 et 1519 en 2015.

Au Québec, la vente de la bière est une affaire importante. Le marché annuel de 2,5 milliards de dollars est dominé par Labatt, Molson-Coors et Sleeman, qui détiennent 91 % du marché. La part des microbrasseries est de 9 %. Toutefois, selon l'Association des microbrasseries du Québec, d’ici 2020, elle pourrait passer à 12 % si les microbrasseries continuent sur leur lancée. Il y a, en effet, une éclosion de microbrasseries. Chaque région, à l’exception du Nord-du-Québec, en compte une ou plusieurs.

Depuis 1996, l’industrie bénéficie d’une réduction de la taxe spécifique sur l’alcool. Elle permet aux microbrasseurs de réinvestir l’économie de taxe ainsi réalisée. Toutefois, ils réclament un plus grand soutien de l’État. Pour évaluer leurs demandes, le ministère des Finances du Québec a commandé une étude visant à dresser un portrait économique et fiscal de l’industrie brassicole au Québec. Cette étude est en cours [5].

LES CIDRERIES

C’est principalement depuis 1988, lorsque la RACJ délivre les premiers permis de fabrication artisanale du cidre que cette boisson renaît. Il faut rappeler que, pendant les décennies qui ont précédé, le cidre était bien peu apprécié des Québécois [6].

Au Québec, le nom de cidre est donné uniquement à une « une boisson alcoolique obtenue par la fermentation alcoolique de jus de pomme et dont le titre alcoométrique acquis est d'au moins 1,5 % et d'au plus 15 % d'alcool par volume ». Quant au jus de pomme, il « ne peut être concentré que par la surmaturation naturelle de la pomme, la déshydratation naturelle et partielle de la pomme, ainsi que par l’action de la chaleur ou du froid naturel ou artificiel sur la pomme et son jus ». Ainsi, l’ensemble des concentrés industriels est exclu [7]. De plus, le produit doit être brassé à partir d’au moins 80 % de pommes québécoises. Cela expliquerait pourquoi les « grands joueurs » du monde brassicole, qui commercialisent également des cidres, sont tenus à l’écart de ce marché au Québec. À titre d’exemple, contrairement aux autres provinces canadiennes, on ne trouve pas ici la boisson au cidre Molson Canadian Cider.

Comme le vin et la bière de microbrasseries, la production cidricole est caractérisée par un grand éventail de produits : cidre tranquille, cidre mousseux, cidre de glace (pour lequel le Québec est particulièrement reconnu), cidre de feu (obtenu par l’ébullition du moût de pomme afin d’en concentrer les sucres), cidre aromatisé aux fruits et même quelques spiritueux (brandy de pomme, vodka aromatisée à la pomme, assemblage de whisky et de cidre de glace, etc.).

La création du cidre de glace à la fin des années 1980, suivie de sa commercialisation au début des années 1990, est à l’origine de la croissance des marchés pour l’ensemble des cidres du Québec, en plus d’avoir suscité un intérêt pour ce produit à l’international. L’appellation réservée d’indication géographique protégée (IGP) pour le Cidre de glace du Québec, reconnue officiellement en décembre 2014, contribue à accroître sa notoriété.

En date de juillet 2017, 64 permis de production artisanale de cidre et 31 permis de production industrielle ont été délivrés, comparativement à 60 et 30 en date de novembre 2015. Aucune statistique n’est disponible concernant le nombre d’emplois dans l’industrie cidricole. 

Selon l’association des Cidriculteurs artisans du Québec, les ventes totales de cidre en 2013 étaient de 1,8 million de litres, alors que, en 2014, elles étaient de 2,46 millions de litres, une croissance de 37 % pour une valeur totale des ventes estimées à 23 millions de dollars. La progression des ventes serait moins rapide au Québec notamment en raison du prix un peu plus élevé, car le cidre est fabriqué avec des pommes du Québec plutôt que de concentré, plus économique. Par ailleurs, l’adoption de la Loi sur le développement de l’industrie des boissons alcooliques artisanales a fait augmenter le nombre de points de vente pour les cidriculteurs également, ce qui aura un effet certain sur les ventes.

LES MICRODISTILLERIES

Après le vin, les bières de microbrasseries et les cidres, l’engouement des Québécois pour les spiritueux va croissant. Le nombre de titulaires de permis de distillateur est en progression pour s’établir à 33 en juin 2017. L’Association des microdistilleries du Québec, créée en 2012, regroupe une douzaine de membres. La majorité des microdistilleries sont en démarrage ou amorcent leur première phase de croissance. Mais déjà, des alcools artisanaux locaux se distinguent sur la scène internationale.

Au cours des cinq dernières années, les ventes de spiritueux du Québec, par l’entremise de la Société des alcools du Québec, ont crû de près de 30 % en moyenne annuellement. En 2010-2011, celle-ci ne comptait que huit spiritueux québécois sur ses tablettes, alors qu’il y en a maintenant près d’une trentaine.  

D’avril 2014 à mars 2015, la part de marché des spiritueux a atteint 14,5 % (contre 79,4 % pour le vin), avec des ventes de 664 millions de dollars.  De ce nombre, les ventes de spiritueux québécois ont fait un bond de près de 19 % en une année, pour atteindre 22 millions de dollars [8].  

En date de juillet 2017, 34 de permis de distillateur ont été délivrés par la RACJ.

Les microdistillateurs n’ont pas tous la même réalité. Certains exploitent leur entreprise en milieu rural et distillent des produits cultivés sur place, d’autres se concentrent sur la distillation en milieu urbain où les produits peuvent provenir de plusieurs sources.

Avant l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, les spiritueux ne pouvaient être vendus qu'à la SAQ ou expédiés hors du Québec. Maintenant, les producteurs utilisant leurs propres récoltes peuvent vendre leurs spiritueux sur leur domaine. Les autres, toutefois, ont dû attendre le budget 2017-2018, Le plan économique du Québec, pour être autorisés à vendre leurs produits à même la distillerie. De plus, les microdistillateurs pourront désormais bénéficier du Programme d’appui au positionnement des alcools québécois dans le réseau de la SAQ, qui jusque-là ne prévoyait rien pour eux [9].

QUELQUES FAITS SAILLANTS DES DERNIERS MOIS

Le 26 mai 2016 est une date importante pour l’industrie québécoise des boissons alcooliques artisanales. En effet, l’Assemblée nationale adoptait, à l’unanimité, le projet de loi no 88, Loi sur le développement de l’industrie des boissons alcooliques artisanales. Un projet de loi très attendu.

Une des retombées positives est que les producteurs de bière, de vin et de cidre artisanaux peuvent maintenant vendre leurs produits dans les épiceries et les dépanneurs du Québec. De plus, les brasseurs artisans sont autorisés à vendre leurs bières sur place pour consommation dans un autre endroit. Ainsi, les bistrots-brasseries peuvent offrir aux consommateurs d’emporter leurs bières afin de les déguster à la maison.

Enfin, les modifications à la réglementation permettent d’afficher les cépages et le millésime sur les bouteilles de vin vendues dans les épiceries et les dépanneurs. Il était auparavant interdit de les inscrire sur ces bouteilles alors qu’ils figuraient sur celles vendues à la Société des alcools du Québec (SAQ).

Dans le but d’accélérer le développement du secteur des boissons alcooliques, le budget 2017-2018, Le plan économique du Québec, prévoit une somme de 9,2 millions de dollars répartis sur cinq ans afin  d’appuyer le développement de l’industrie de la distillation (5,2 millions de dollars), d’adapter l’encadrement de l’industrie brassicole et de soutenir les initiatives de commercialisation du secteur des boissons alcooliques (4 millions de dollars).

Dans cette optique, le Plan prévoit que des modifications seront apportées dans le but, entre autres :

  • D’autoriser l’ensemble des distillateurs à faire déguster « sur les lieux de fabrication les produis fabriquée sur place »  et à les vendre pour consommation dans un autre endroit.
  • D’étendre le Programme d’appui au positionnement des alcools québécois dans le réseau de la SAQ aux distilleries.
  • De faciliter la tenue d’événements ayant pour objectif la présentation et la découverte de bières.
  • D’autoriser les producteurs artisanaux de bière à vendre directement aux titulaires de permis de réunion.
  • De soutenir les initiatives de commercialisation du secteur des boissons alcooliques avec la mise en place d’un programme d’appui. 

De plus, dans ce plan, le gouvernement indique son objectif de déployer un projet de modernisation de la RACJ en trois phases : « moderniser la culture institutionnelle de l'organisme », « réviser la réglementation et l'encadrement des boissons alcooliques », une mesure réclamée depuis plusieurs années par les acteurs de l'industrie, et « assurer de meilleurs suivis avec l'industrie sur des enjeux de fond ».

Rappelons que, à cet égard, le député de Jean-Lesage avait reçu le mandat du ministre de la Sécurité publique de mener des consultations auprès des représentants du secteur. D’ailleurs, le 14 juin 2017, le gouvernement a annoncé la publication de projets de règlement visant à alléger le fardeau administratif de plusieurs titulaires de permis d'alcool.

 

RÉCENTS TRAVAUX PARLEMENTAIRES
  • Adoption le 26 mai 2016 du projet de loi n° 88, Loi sur le développement de l’industrie des boissons alcooliques artisanales. Notamment, elle autorise les producteurs artisanaux de vin et de cidre à vendre leurs produits dans les épiceries et dépanneurs. Elle permet aux producteurs artisanaux de bière de vendre leurs produits sur les lieux de fabrication pour consommation dans un autre endroit.
EN QUELQUES MOTS
  • L’industrie des boissons alcooliques artisanales est en expansion au Québec.
  • Les producteurs de boissons alcooliques artisanales devaient, jusqu’à tout récemment, conjuguer avec des règles qui restreignaient grandement leurs activités. Selon plusieurs, la pression émanant de la réglementation étouffait lentement l’industrie.
  • La mise en œuvre de la Loi sur le développement de l’industrie des boissons alcooliques vise à favoriser un déploiement plus large de l’industrie des boissons alcooliques artisanales.
  • Le plan économique du Québec prévoit une somme de 9,2 millions de dollars répartis sur cinq ans afin d’appuyer le développement de l’industrie de la distillation, d’adapter l’encadrement de l’industrie brassicole et de soutenir les initiatives de commercialisation du secteur des boissons alcooliques.
  • Le gouvernement a entrepris une démarche de modernisation de la RACJ.
EN QUELQUES CHIFFRES
Nombre de permis de bière (artisan brasseur et fabricant industriel)
  • 2011 :   84
  • 2017 : 182

19 %Hausse des ventes de spiritueux québécois entre 2014-2015

2 millionsNombre de bouteilles de vin québécois vendues annuellement

Chiffre d’affaires de l’industrie cidricole23 millions $

 



[1] Institut de la statistique du Québec, Profil sectoriel de l’industrie bioalimentaire au Québec, éditions 2014 et 2016.
http://www.stat.gouv.qc.ca/statistiques/agriculture/profil-industrie-bioalimentaire_an.html

[2] Régie des alcools, des courses et des jeux, Registres des permis de fabricant en vigueur.
https://www.racj.gouv.qc.ca/registres-publics/alcool.html

[3] Alexandre Duval, « Vers des ruptures de stock pour les vins du Québec? », Radio-Canada, 8 juillet 2017.
http://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1044149/vins-du-quebec-epicerie-ventes

[4] Frédéric Lacroix-Couture, « Le boom des microbrasseries au Québec », Journal Métro, 16 décembre 2015.
http://journalmetro.com/plus/bouffe/891638/le-boom-des-microbrasseries-au-quebec/

[6] L’histoire du cidre est plutôt singulière. Si le premier verger et premier pressoir fait son apparition sur les flancs du mont Royal, par l’œuvre des Sulpiciens en 1660, le cidre disparaît presque totalement de 1921 à 1970 pour des raisons administratives. En effet, la Commission des liqueurs avait oublié de l’inclure dans sa législation. Lorsqu’il a été finalement clairement mentionné dans la loi, sa popularité a explosé. La forte demande a incité les cidreries industrielles à fabriquer de très grandes quantités de cidre à partir de concentrés plutôt que de pommes, ce qui en a fait un produit d’assez faible qualité, entachant ainsi la réputation du cidre.

[7] Règlement sur le cidre et les autres boissons alcooliques à base de pommes.
http://legisquebec.gouv.qc.ca/fr/pdf/cr/S-13,%20R.%204.pdf

[8] Gary Lawrence, « On n’a plus les alambics qu’on avait! », L’actualité, 19 novembre 2015.
http://lactualite.com/culture/2015/11/19/on-na-plus-les-alambics-quon-avait/

[9] Avant l’adoption du budget 2017-2018,  le Programme visait le vin, le cidre, l’hydromel, la mistelle et les liqueurs à base de petits fruits ou d’érable. Les spiritueux n’étaient pas admissibles au programme.

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