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Cinq lectures pour comprendre... Le décrochage des enseignants

Objet

Il est souvent question de décrochage scolaire des jeunes, mais il en existe une autre forme dont on parle moins, celui des enseignants. Pourtant, ce phénomène, que certains appellent « l’autre type de décrochage », a lui aussi de lourdes conséquences. En effet, comme l’affirme la professeure Joséphine Mukamurera [1] : « À l’heure où l’attrait et l’image de la profession sont à reconstruire, et où la précarité d’emploi est persistante, la persévérance professionnelle des enseignants représente sans doute un enjeu majeur des systèmes éducatifs et une condition de la réussite des élèves. » 

Ce phénomène, qui touche davantage les enseignants en début de carrière, est de plus en plus répandu au Québec et au Canada. Des chercheurs se sont penchés sur la question et le but, ici, est de voir comment certains d’entre eux tentent de l’expliquer.

Les cinq lectures pour comprendre

1 /  Kamanzi, Pierre Canisius, Maurice Tardi et Claude Lessard, «  Les enseignants canadiens à risque de décrochage : portrait général et comparaison entre les régions », Mesure et évaluation en éducation, vol. 38, no 1, 2015, p. 57-88.

Cette étude porte sur les caractéristiques des enseignants canadiens ayant une intention manifeste d’abandonner la profession et pouvant être considérés comme étant « à risque de décrochage ». Plus précisément, elle se centre sur les aspects liés au rapport au métier, comme le sentiment de compétence, la satisfaction professionnelle, les conditions de travail et les relations avec les collègues. L’étude compare la situation entre les différentes régions canadiennes (là où les données le permettent).

Les résultats révèlent, entre autres, que 24 % des répondants pensent souvent quitter la profession. Bien qu’aucune province ne soit à l’abri du décrochage des enseignants, la situation varie grandement selon les régions observées. Ainsi, la proportion de ceux qui pensent souvent à démissionner est de 33 % en Colombie-Britannique, de 26 % au Québec et dans les Prairies alors que, dans les provinces maritimes, elle est de 15 %.

Par ailleurs, quelle que soit la région, trois caractéristiques distinguent les enseignants ayant l’intention de décrocher : 1) un fort sentiment de vivre des relations difficiles avec les élèves, 2) une perception négative des effets des politiques éducatives et 3) une insatisfaction à l’égard des conditions de travail.

2 /  Karsenti, Thierry P., et autres, Analyse des facteurs explicatifs et des pistes de solution au phénomène du décrochage chez les nouveaux enseignants, et de son impact sur la réussite scolaire des élèves, 2015, 23 p.

Le principal objectif de cette étude est de mieux comprendre le décrochage des nouveaux enseignants et ses conséquences sur la réussite scolaire des élèves. Quelque 1252 acteurs de l’éducation ont participé à la collecte des données. Parmi eux, de futurs enseignants, des personnes qui poursuivent la carrière depuis moins de cinq ans, d’autres qui l’ont abandonnée, des enseignants d’expérience témoins du décrochage de jeunes collègues et des directeurs d’école.

La section 4 de l’étude présente les résultats de la recherche. Six principaux facteurs expliquent le décrochage des nouveaux enseignants. La charge de travail trop importante arrive au premier rang pour l’ensemble des répondants. Viennent ensuite la gestion de classe, le climat à l’école, le manque de formation (initiale ou continue), des ressources déficientes et le soutien difficile aux élèves en difficulté. Ces facteurs recoupent d’ailleurs ceux relevés par d’autres études analysées dans le présent document.

L’instauration d’un système de mentorat est perçue comme étant la piste de solution la plus efficace. Parmi les autres façons de résoudre le problème, soulignons la mise en place d’un horaire de travail allégé pour les nouveaux enseignants, un plan de soutien pour leur insertion professionnelle, la création d’espaces de collaboration entre enseignants d’expérience et les nouveaux et enfin la création de réseaux de partage de ressources pédagogiques à leur intention.

3 /  Mukamurera, Joséphine., « Le développement professionnel et la persévérance en enseignement : éclairage théorique et état des lieux. », dans L. Portelance, S. Martineau et J. Mukamurera (dir.), Développement et persévérance professionnels dans l'enseignement. Oui, mais comment?, Québec, Presses de l’Université du Québec, 2014, p. 9-33.

L’auteure affirme que si la nécessité du développement professionnel dans le domaine de l’enseignement n’est plus à établir, le concept lui-même reste relativement flou. Sur la base d’une recension des plus récents écrits sur le sujet et de sa connaissance de la profession enseignante, elle propose une définition du développement professionnel enseignant.

Mukamurera s’intéresse ensuite au processus même du développement professionnel, plus précisément à ses trois moments clés. En effet, celui-ci est conçu comme un continuum comportant trois phases : la phase de la formation initiale, celle de l’insertion professionnelle et enfin celle de la formation continue, soit la persévérance dans la profession.

Parler de la persévérance dans la profession, comme le précise la chercheure, oblige à parler du décrochage professionnel. C’est pourquoi la dernière section dresse l’état de la situation sur le sujet et présente ensuite les mesures et les pratiques considérées comme favorisant la persévérance dans la profession des enseignants débutants.

4 /  Tardif, Maurice, « Les enseignants du Canada : une vaste profession sous pression », Formation et profession, vol. 20, no1, 2012, 8 p.

L’auteur dresse un portrait de la situation de la profession enseignante au Canada. Il rappelle que les enseignants de l’école publique constituent le plus important groupe de travailleurs ayant une formation universitaire au Canada. En 2013, environ 340 000 de ces travailleurs enseignaient à un peu plus de cinq millions d’élèves, soit 15 % de la population canadienne.

Tardif montre ensuite comment, aujourd’hui, la profession est soumise à des forces de changement sans précédent. De fait, les classes sont de plus en plus hétérogènes et les enseignants sont confrontés à des exigences toujours plus lourdes et complexes.

Enfin, l’auteur met en évidence le poids grandissant de l’économie dans les missions assignées à l’école. La transformation du travail des enseignants ne découle pas uniquement des changements sociaux. Elle est aussi liée au nouveau statut accordé à l’éducation au Canada et dans la plupart des sociétés développées : celui d’un « instrument au service de l’économie ».

5 /  Gingras, Channy et Joséphine Mukamurera, « S’insérer en enseignement au Québec lorsqu’on est professionnellement précaire : vers une compréhension du phénomène », Revue des sciences de l'éducation, vol. 34, n°1, 2008, p. 203-222.»

Cet article présente les résultats d’une recherche qui vise à comprendre comment la précarité affecte l’insertion professionnelle en enseignement au secondaire au Québec, en privilégiant les perspectives des enseignants débutants. L’étude vise aussi à dégager des motifs et des circonstances de persévérance en enseignement, en dépit de cette précarité.

Contrairement aux autres lectures proposées, l’échantillon de cette étude est beaucoup plus petit. Il est constitué de sept enseignants, deux hommes et cinq femmes. Ils proviennent de cinq commissions scolaires et de quatre champs d’enseignement différents. Ils ont entre une et quatre années d’expérience. Les auteures soulignent que, vu le nombre restreint de participants, l’étude n’est pas représentative statistiquement ni généralisable. Cependant, selon elles, certains thèmes relevés permettent d’éclairer la place de la précarité dans l’insertion en enseignement. De plus, elles approfondissent la compréhension de ce que peuvent vivre les débutants de l’enseignement au secondaire au Québec.

Les résultats de la recherche révèlent qu’une insertion réussie ne repose pas nécessairement ou uniquement sur l’acquisition du statut permanent. Elle se base davantage sur des facteurs tels que l’intégration dans le milieu de travail, la qualité de la tâche et la stabilité du contexte pédagogique. De plus, les conditions de travail liées au statut précaire ont une incidence sur des aspects importants du métier (maîtrise de la matière, gestion de classe, travail en collégialité) et sur la santé psychologique des enseignants. C’est aussi la qualité de l’enseignement et des interventions éducatives auprès des élèves qui peut être affectée. Enfin, bien que les participants souhaitent continuer d’enseigner, ils disent remettre en question de façon récurrente leur carrière. Cela peut survenir à des moments clés ou dans des conditions particulières. Par exemple, les périodes d’attente d’une affectation pendant l’été, le changement d’école, de tâche ou la supplantation par un collègue qui a plus d’ancienneté.

Et cinq autres lectures (pour aller plus loin)

1 /   Réseau d’information pour la réussite éducative, « Les défis professionnels des enseignants. Dossier thématique », publié le 16 février 2016 par Lucie Barriault.

2 /   Kettani, Assïa, « Changer le monde, un enfant à la fois : quatre enseignants du primaire se confient », Cahier spécial, Le Devoir, 1er février 2014.

3 /   Boies, Isabelle et Liliane Portelance, « La collaboration dans les milieux d’accueil des enseignants débutants »,  Développement et persévérance professionnels dans l'enseignement. Oui, mais comment?, 2014, Québec, Presses de l’Université du Québec,  p. 191-209.

4 /   Leroux, M. « Surmonter les défis inhérents à l’insertion professionnelle : vers une exploration du processus de résilience d’enseignants débutants du préscolaire et du primaire », Développement et persévérance professionnels dans l’enseignement : oui mais comment?, Québec, Presses de l’Université du Québec, 2014, p. 115-136.

5 /   Maurice Tardif, La condition enseignante au Québec du XIXe au XXIe  siècle. Une histoire cousue de fils rouges : précarité, injustice et déclin de l’école publique, Québec, Presses de l’Université Laval, 2013, 350 p. (Principalement, la partie 4 qui porte sur la condition enseignante aujourd’hui.)


Préparé par Hélène Bergeron, Service de la recherche, octobre 2017



[1] Joséphine Mukamurera est professeure titulaire à la Faculté d’éducation de l’Université de Sherbrooke et chercheure au Centre de recherche interuniversitaire sur la formation et la profession enseignante.

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